Souvenirs de Sidi-bel-Abbes
Le carré de 18 m par Jean-Paul de Haro
Encore une histoire de foot ! Vous n’y êtes pas du tout, il s’agit ici de pratique pédagogique aujourd’hui dépassée. Seuls les plus anciens d’entre nous, car comme le chante notre chanteur-poète national, « je vous parle d’un temps… », se souviendront que c’était tout simplement le nom que nous avions attribué à une cérémonie traditionnelle qui à la fin de chaque trimestre réunissait tous les élèves du collège, leurs professeurs et l’équipe de direction.
Imaginez les différentes classes de la 6° à la 1ère, sur trois au quatre rangs de profondeur, disposées en forme de carré qui prenait naissance à la sortie des services administratifs et couvrait approximativement la surface du terrain de sport. D’où l’appellation de « carré de 18m » qui ne l’oublions pas est avant tout une surface de réparation, n’est-ce pas !
Une certaine tension régnait lors la mise en place car nous connaissions tous le déroulement intangible du cérémonial : silence total dans les rangs, arrivée du
Principal et du Surveillant-général qui documents en mains devenait l’acteur principal de la matinée et procédait à la proclamation attendue des résultats scolaires et des appréciations sur le comportement général des élèves. Un énoncé fastidieux attendu avec une inévitable appréhension puis suivi d’un soulagement apprécié dès que le sort de notre propre classe avait été réglé. Mais presque inévitablement le programme, conventionnel pourtant, offrait des surprises qui en faisaient toute la saveur lorsque l’on passait à l’examen des cas individuels : les tout meilleurs étaient cités « à l’ordre de …l’exemplarité » puis venait le tour des insoumis et des récidivistes appelés à sortir des rangs pour recevoir leur châtiment : lecture du motif et de la punition afférente.
Concernant les meilleurs pas de surprise, les mêmes noms ou presque revenaient et nous les connaissions, mais chez les punis il y avait matière à découverte et certains acquéraient une reconnaissance
proportionnelle à la gravité de leur écart comme notre camarade qui en un trimestre avait enterré trois fois sa grand-mère pour justifier ses absences. Le châtiment pouvait prendre des formes inconcevables de nos jours comme par exemple celui subi par notre ami qui, sur le front des classes, reçut en guise de lavage de cerveau un massage de crâne avec trousseau de clés serré dans la main du masseur, le Surgé en l'occurrence. Invariablement le Principal clôturait la séance par une brève intervention dont la teneur dépendait de la qualité du bilan présenté, les résultats sportifs en faisaient partie.. Nous ferions mieux la prochaine fois !
Cette mini distribution des prix assortie d’un volet répressif présentait quand même l’avantage de signifier l’imminence du départ en vacances et surtout de favoriser l’intégration des nouveaux , la connaissance mutuelle des élèves de tous niveaux avec pour conséquence la Consolidation d’un bloc…dont Mekerra’s constitue l’héritage.